Des livres sur le contenu pour l’Aperö
Le 18 Novembre dernier, Kontnü organisait son APERÖ#6. En mode confinement, comme il se doit et au format #BookClub 📘. En guise de cacahuètes, chacun est donc venu avec un livre ou une publication sur le contenu qu’il ou elle avait envie de partager. Idéal pour engager la conversation. Fidèle à notre vocation œcuménique du contenu, nous avons donc parlé écriture, UX contents, Storytelling, data visualisation, Design Thinking et émoticônes. Avec quelques belles surprises qu’on vous partage…
Premier à se coller à l’exercice, votre serviteur, venu avec le livre « L’homme est un compteur d’histoire » d’Adrien Rivière. L’auteur, connu pour ses analyses des prises de paroles décisives comme celles de Greta Thunberg ou de Steve Jobs nous offre un livre sur le Storytelling qui évite les poncifs du manuel du « gentil petit storyteller ». Et c’est tant mieux.
Ce n’est ni un livre à charge, comme peut l’être celui de Christian Salmon, ni une méthode à suivre mais plutôt une immersion dans le caractère universel du récit. Pourquoi on aime raconter des histoires et pourquoi on aime les écouter. Et pourquoi également elles sont un espace de représentation nécessaires pour faire société et créer du sens. Une notion chère à Kontnü.
Il y aborde évidemment les éléments fondamentaux comme le schéma actantiel ou le voyage du héros, mais le livre va au-delà en faisant des aller-retours entre les mythes, les contes, l’Antiquité, Hollywood ou la littérature. On y croise Walt Disney et Rolland Barthes, Sherlock Holmes et Sigmund Freud. On y parle intelligence narrative et théories du complot.
Ce que j’ai aimé dans ce livre, c’est qu’il donne de l’épaisseur à ce que l’on appelle la « mise en récit » sans chercher à nous convaincre de quoi que ce soit ni chercher à nous donner une recette du succès. C’est un beau condensé de tout ce que j’ai pu croiser jusqu’à présent sur le sujet et ça reste très agréable à lire…
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- Si vous voulez en parcourir quelques pages, c’est par ici
- Si vous souhaitez écouter une interview de l’auteur en podcast, c’est plutôt par là
Content design, search quality rating et SEO
Après le précédent apéritif (#5) ou nous avions parlé de l’émergence de la notion de « content design », la content designer Sonia Milanello a rapidement fait un retour (mitigé) sur le livre de Sarah Richards qui lui était consacré. « C’est un mix de plusieurs de nos métiers. C’était pas mal de SEO, mais pour moi, c’était quand même du basique de basique. Pour ce qui concerne la recherche sémantique et lexicale, ça ne va pas très loin ». Un bilan que partage en grande partie Lise Janody « C’était bien, mais il n’y avait rien de nouveau. C’est expliqué de manière assez claire pour des gens qui n’y connaissent rien ». Bon.
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- Si vous voulez toute de même en savoir plus, c’est par là
Après ça, Sonia a admis feuilleter les « search quality rating » publiées par Google. Du contenu sans doute moins inspirant, mais pour le coup beaucoup plus opérationnel car en matière de SEO et d’expérience utilisateurs, autant se tourner directement vers Dieu plutôt que vers ses saints.
Le document, qui fait quand même près de 180 pages, expose à qui veut le lire les nombreux critères de notation utilisées par Google pour qualifier et répondre à la sacro-sainte question : « qu’est-ce qu’un bon contenu » (pour Google NDLR). Une information surtout mise à disposition des personnes (les search quality raters) pour leur donner des critères d’évaluation communs et leur permettre de donner du feed-back pour entrainer les algorithmes. Du contenu « un peu technique, mais quand même abordable » confesse Sonia Milanello.
« Pour nous c’est utile, il y a des supers infos. Rien que pour comprendre comment on peut répondre aux questions des utilisateurs, à quel point un contenu est pertinent ou pas. C’est pas mal de le feuilleter. Dès lors qu’on essaie de faire du bon contenu, c’est utile »
Une utilité confirmée par l’ancien Googler et web analyst Sébastien Monnier : « c’est presque plus utile pour les personnes qui font de l’architecture de l’information que pour du SEO ». Un document qui se consulte donc, plus qu’il ne se lit. Mais c’est aussi ça la stratégie de contenus.
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- Pour ceux qui veulent tout connaître du Search Quality Rating de Google, suivez le lien.
- Et ceux qui veulent comprendre qui sont les Search Quality Raters, c’est ici…
Rédaction et méthodes : écrire, ça s’apprend
L’auteur et journaliste Sébastien Bailly est venu présenter (presque en s’excusant) son livre sur « la maîtrise des techniques rédactionnelles ». Un ouvrage qui revient volontairement aux fondamentaux de l’écriture pour en rappeler les basiques. Choisir ses mots, construire ses phrases, organiser ses idées, faire un titre. Un ouvrage avant tout guidé par le bon sens. « Je donne des cours de technique rédactionnelle en Licence pour les futurs chargés de com’. Je n’ai pas trouvé le manuel que j’avais envie de leur conseiller, donc je l’ai écrit ».
Une partie du livre est consacrée à l’écriture inclusive, qui est sujet de controverse même chez Kontnü. « L’objectif, c’est d’être lisible. Pour l’écriture inclusive, je ne change pas de cette idée-là » (spoiler : c’est pas forcément bien parti pour la défense du point médian 😊)
« On montre ce qu’est un rythme, un plan. On ne va pas jusqu’au storytelling mais on apprend ce qu’est une prolepse, une analepse et comment on peut en faire des choses quand on raconte une histoire. »
Le livre part du principe que l’écriture est avant tout une question de méthode et non, comme on le pense parfois, de don. Il assume donc sa fonction de manuel donnant les clés pour une écriture fluide, accessible, dépouillée de toute complexité qui peut en brouiller le sens. Mais qui peut, selon certains (dont moi !) en appauvrir le style. Chasser les adverbes, c’est chasser la nuance, non ? « Mon propos est bien de s’interdire les adverbes pour les utiliser en conscience. Le fait que ce soit interdit doit servir à me rendre compte que j’en utilise » précise Sébastien Bailly avant de conclure : « il n’y a pas d’interdiction qui tienne en matière d’écriture ». Ouf !..
UX Writing et microcopie
La content manager Anne-Charlotte le Diot a choisi de nous présenter une étude menée auprès d’UX Writers qui nous livre un panorama de l’état de l’art de cette discipline au carrefour du design et de la rédaction.
Au-delà des résultats intéressants sur le sujet qu’on peut retrouver ici, c’est la liste d’articles et de livres de référence proposée en fin d’étude qu’Anne-Charlotte voulait nous présenter. Notamment le « guide de la microcopie » réalisé par Kinneret Yifrah et qu’elle doit prochainement lire. Un livre encore à découvrir, donc, mais dont la traduction en français n’a pas bonne presse, selon Loreleï Fritsch. Si vous avez eu l’occasion de le lire, on est preneurs de vos retours.
Eloge de la langue vivante
La consultante éditoriale Loreleï Fritsch nous rappelle justement quelques fondamentaux. « Pour faire écho à ce qu’on disait, je viens de commencer « The art of fiction » de John Gardner qui commence par dire qu’il faut arrêter avec les règles d’écriture, ça ne sert à rien ».
Après ce petit disclaimer apéritif, elle nous a présenté « Le Français est à nous » sous-titré « Petit manuel d’émancipation linguistique ». Une petite promesse de truculence dans la manière d’aborder le sujet de la part des deux auteures Maria Candea et Laélia Véron, deux linguistes dont nous avions déjà parlé dans un article faisant référence aux mots du pouvoir.
Certains jeunes auraient 400 mots de vocabulaire.
Les autrices du « Français est à nous ! Petit manuel d'émancipation linguistique » @MarCandea et @Laelia_Ve répondent au linguiste Alain Bentolila !
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— Éditions La Découverte (@Ed_LaDecouverte) April 12, 2019
L’ouvrage est un éloge à une langue vivante, qui se nourrit de ses usages et de ses influences, loin du dépérissement dont on veut parfois l’affliger. « C’est de se dire comment, nous qui sommes des professionnels de l’écriture, on peut donner des clés de compréhension à ceux qui nous lisent. Plutôt que de vendre de la peur ». « C’est super facile à lire. Pour autant c’est écrit par deux scientifiques. » Une lecture de confiance donc, « un peu différent d’un certain nombre de contenus qu’on peut trouver sur la langue » selon Loreleï.
« Le livre fait écho à des prises de position de l’association sur la responsabilité de ce que les gens écrivent. »
Il y a tout un passage sur l’insécurité linguistique. « C’est un concept que j’ai découvert » et qui rappelle le concept de rédaction clair et à la conférence qu’avait donné Anne Vervier à Kontinüum (la conférence organisée par Kontnü NDLR).
« Vous ne lirez plus jamais un truc de l’académie française ou du Figaro de la même façon après l’avoir lu. »
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- Pour le rafraichissant « Français est à nous », c’est ici
- Pour l’excellente série de podcasts « Parler comme jamais » animée par Laélia Véron, c’est plutôt là
- Et pour l’incontournable « Art of Fiction » de John Gardner, c’est là
La donnée, un contenu (pas) comme les autres
En bon web analyste, Sébastien Monnier s’est quant à lui plutôt tourné vers l’univers plus tech de la datavisualisation avec l’ouvrage « Storytelling with datas », qui décrypte avec pas mal d’exemples comment le travail de représentation de la donnée parvient à simplifier l’information. « On parlait du langage clair, mais c’est aussi une forme de langage clair du graph » précise-t-il. Le travail fourni par le New-York Times est, pour lui, remarquable en la matière.
« On aurait intérêt à s’inspirer des pratiques de la data visualisation pour transmettre des messages au sein de l’entreprise. En fait, le sujet de savoir comment utiliser la donnée pour communiquer me parait assez essentiel. »
Un peu à contre-pied, Sébastien a tenu aussi à nous présenter deux ouvrages plus anciens (et plus académiques) issus de ses études de linguistique : un premier sur la notion de « Métalangage » et plus largement l’importance des travaux de Gilles Fauconnier, sur les espaces mentaux. « Ce sont ces images de représentation que je trouve intéressants et qui trouvent aujourd’hui échos dans le conditionnement de nos comportements en ligne. »
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- Si le livre « storytelling with data” vous intéresse, c’est ici
- Pour un petit best-of des réalisations de l’équipe dataviz du New-York Times, c’est là
- Le livre sur le « métalangage » semble épuisé, mais on retrouve quelques éléments de compréhension de son auteur ici
- Et pour les plus courageux, les travaux de Gilles Fauconnier se retrouvent un peu partout sur le web, mais on peut en avoir un extrait ici
Contenus et environnement : le coté obscur du contenu
La content strategist (et présidente de Kontnü) Lise Janody a, quant à elle, choisi de nous parler de l’ouvrage World Wide Waste écrit par Gerry Mac Govern, un vieux briscard de la stratégie de contenus qui s’est intéressé à l’impact du numérique sur l’environnement. Sujet on ne peut plus d’actualité.
Même si le bouquin traite de l’impact du digital au sens large, il questionne (par conviction ou opportunisme ?) la contribution du contenu à cette pollution. « C’est un livre assez personnel qui dit en substance ‘’ça fait 10 ans que je travaille dans le contenu digital et j’ai le sentiment d’avoir contribué à l’essor de quelque chose complètement néfaste pour la planète’’ » nous dit Lise.
L’auteur part du postulat que 90% des contenus créés sont un peu comme des plastiques à usage unique : ils ne servent à rien et il faudrait les bannir totalement. La notion de « commodité », qui est au cœur de la dynamique web et de l’« users centric », conduit finalement au gâchis et à la surconsommation. Un constat assez désabusé.
« J’ai été assez sensible à ses arguments sur l’importance de travailler l’architecture d’information, la trouvabilité, l’archivage. Le livre interroge les questions de gouvernance, de gestion de contenus, de taxonomie et d’architecture d’information qui ont un vrai rôle à jouer pour limiter la propagation des contenus et contribuer au bien de la planète. Ça m’a donné envie de creuser un peu plus le sujet sur la partie contenu, que j’ai trouvée un peu légère de la part de quelqu’un qui a fait toute sa carrière dans le contenu web. »
Et c’est vrai que le sujet de la sobriété éditoriale est un sujet qu’on a bien envie, à Kontnü, d’aborder lors d’un prochain Kontinüum. Mais on en reparlera en temps et en heure 😉
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- Gerry Mac Govern a eu la fort bonne idée de nous mettre les contenus de son livre en ligne ici.
Le mariage heureux du design et du contenus
Un petit tour du côté des métiers du design avec Pauline Thomas, fondatrice du LapTop, collectif qui réunit et forme les UX Designers et cherche à sortir d’une pensée purement usage et business du métier. Elle est venue nous présenter « Design Sprint en pratique », le livre dont elle est l’auteure. « C’est important qu’on puisse allier design et contenus. On doit vraiment travailler ensemble » précise en préambule Sonia Milanello.
« Le design sprint est un format du design thinking. On réunit les métiers, les personnes associées à la stratégie, au business, les développeurs et les designers pour actionner le projet plus vite. C’est un bel argument pour faire entrer les méthodes de design dans l’entreprise à un niveau opérationnel et stratégique. »
Le sujet vient en résonance avec la discussion d’un précédent Apérö où nous avions souligné la difficulté de faire entrer dans ces processus de production l’étape de la production de contenu, qui demande du temps pour arriver à maturation. « Faire la partie design et la partie contenu en même temps pose parfois quelques soucis » rappelle Lise Janody. « Le problème, c’est le mot ‘’sprint’’. Le principe n’est pas d’aller plus vite pour faire mieux avec moins de temps. » répond Pauline. « Faire un sprint, ce n’est pas faire un projet parfait. C’est tester un concept. Tous les métiers ont besoin de plus de temp. L’UX writier est hyper important dans le prototypage » ajoute-t-elle avant de préciser : « on voit que les mots sont un gros facteur d’échec ».
Un beau sujet pour un prochain Aperö (?)…
Le sens, toujours le sens
Marie Girard-Choppinet est venue sans livre, mais avec une exclusivité : elle vient elle-même de terminer l’écriture d’un ouvrage qui retrace toutes les étapes de conception du contenu, en particulier le contenu pédagogique des entreprises, qui occupe un pan important de la production de contenus rarement mis en lumière.
On attend donc impatiemment la sortie de cet ouvrage qui porte pour le moment de nom de code « les designs du sens ». Tout un programme à suivre.
Du contenu sans les mots
Pour boucler cette session #6 de l’Aperö, Sonia Milanello a voulu nous présenter un dernier ouvrage clin d’œil : « Une histoire sans mot » de Xu Bing qui avait un temps fait parler de lui en réussissant la prouesse du récit exclusivement en émoticône. 130 pages de narration pictographique. Un langage à part entière.
« Ca m’intéressait de regarder, car au-delà du roman, c’est aussi un exercice artistique. J’ai voulu tester et j’ai lu ça super facilement ». Un avis vraisemblablement plus modéré de la part des personnes à qui elle a prêté le livre qui n’ont pas tous réussi à en venir à bout.
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- Pour ceux qui veulent voir à quoi peut bien ressemble un livre uniquement écrit en émoticône, c’est là
What’s next ?
Prochain rendez-vous : le 10 Décembre 2020. A la suite du SEO Campus, Eve Demange et Alexandre Leblanc animeront une webconférence pour présenter le retour d’une mission de stratégie de contenu faite avec l’Agence Français de Biodversité. Mots-clés, champ sémantique et territoire de contenus en perspective !
Save the date !
Ravi d'avoir présenté cette conférence aux côtés de @EveDemange.
Un peu short sur le temps toutefois 😬 https://t.co/O4In4QlWXl
— Azincourt (@MaisonAzincourt) September 28, 2020
On vous en dit plus rapidement…
En attendant portez-vous bien !